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– Ne vous en faites pas, nous avons l’habitude, vu le
nombre de disparitions de personnalité de premier plan
que nous avons à gérer. La vôtre est facile, vous n’avez
rien d’un gros poisson, dans quelques jours on vous aura
vite oublié !
– Qu’est-ce que vous allez faire de moi ? Me tuer ? Me
vendre ? M’échanger ?
– Non, vous allez vous racheter en nous rendant un
petit service !
– Je ne vois pas ce qu’un écrivain vient foutre dans
vos histoires !
– Écrivain, journaliste pour nous, c’est pareil, nous
redoutons davantage un article ou un reportage à la té-
lévision que le travail d’un magistrat !
– C’est bien possible, mais vous n’avez pas le droit de
me séquestrer.
Passablement agacé de se retrouver coincé dans ce nid de
vipères sans pouvoir se défendre, Alexandre se demande
quel sera le sort qui lui sera réservé. Il remarque que la
salle dans laquelle ils se trouvent est remplie d’œuvres
d’art de diverses époques.
– Je ne crache pas sur le passé de ma famille, leurs af-
faires m’ont permis de faire de solides études de conserva-
teurs en France, aux États-Unis et naturellement en Italie.
De plus en plus désappointé par cette archéo-mafia
dont il avait entendu parler à propos de deux tableaux
du peintre hollandais Vincent Van Gogh, retrouvés par
les carabiniers dans la propriété d’un mafieux napoli-
tain à la tête d’une organisation criminelle, spécialisée
dans l’achat des œuvres d’art pour blanchir l’argent de
la drogue.
– Permettez-moi de vous souhaiter la bienvenue dans
le clan de la grande famille, Alessandro !
– Doucement s’il vous plaît ! Laissez-moi deux minutes !
– Levez-vous, Alexandre, j’ai à vous parler !
– C’est si urgent ?
– Je vous attends dans la pièce qui se trouve à côté !
Un peu agacé par cette intrusion, Alexandre, en s’ha-
billant, se demande qui a bien pu avoir l’idée saugrenue
de le faire enlever pour l’envoyer en Espagne. Il n’a rien
à voir avec le monde de la corrida, il n’est pas attendu
chez le roi Juan Carlos et il ne joue pas au foot avec le
Barça. Cherchez l’erreur. Il est invité à rejoindre le ma-
tador dans la pièce d’à côté, pour y chercher quelques
éléments de réponse :
– Je suis Don Basileo, le neveu de Stefano que vous
avez rencontré à Palerme, je suis né à Marseille.
– C’est bien, c’est très bien ! Mais encore ?
– Pendant votre interview à la télévision, vous vous
êtes laissé aller à divulguer des choses que mon oncle
Stefano Scarcella n’a pas appréciées, il vous avait confié
un secret, vous lui aviez donné votre parole, vous avez
donc trahi sa confiance, vous avez joué et vous avez perdu !
– C’est vous qui le dites, si vous revoyez la vidéo de
mon interview, je n’ai rien sous-entendu qui puisse mettre
en danger votre oncle, ni révéler le secret de l’initiation.
J’ai seulement dit que les jeunes recrues devaient se sou-
mettre à un rite initiatique.
– Aucun de nos chefs n’oseraient aborder ce sujet en
public !
– Vous avez fait une grosse connerie en me faisant
enlever !