Dans toute l'histoire de l'Empire, un seul homme a réussi trois
fois les épreuves : à l'âge de cinquante ans, Mehen Shedhenlu
triompha de son adversaire âgé d’une vingtaine d’années.
Je voudrais maintenant vous parler d'un de ces enfants
venus à Belhassa, il s’appelait Sherba Anhoc.
Sum-pa Jigme s'interrompit pour se resservir du thé.
Le vieillard m’observait anxieusement, comme s'il craignait
que je parte tout à coup. Je regardai de nouveau ma montre,
il se faisait tard, mais ma curiosité était excitée. Une
remarque brûlait mes lèvres :
«Vous pensez vraiment, si cet Empire existait, que l'on
acceptait ce massacre? Il n'y avait aucune rebellion ?
- Monsieur Mandin, vous êtes trop bon, ou trop naïf :
l’Histoire est là pour nous rappeler que des systèmes
politiques autrement plus rudes et cruels ont existé et perduré,
parfois pendant des siècles... Et remettez-vous simplement
dans le contexte de ces civilisations passées : la vie des
enfants ne comptait pas. Pour les parents, c’était un immense
espoir d’ascension sociale que de sacrifier leur enfant. Si
celui-ci survivait, il ne devenait rien de moins
qu’Empereur ! »
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