Jean-DiDier
et si c’était DéJà écrit ?
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de curiosité littéraire. Jamais son expérience ne l’avait
poussé à considérer l’inexplicable comme le produit de
forces inconnues de la science humaine. Confronté à
Mike et à cette transmission d’images et de sentiments, il
réfléchissait du côté de l’hypnose, se disait que ses visites
dans la chambre de Mike se passaient en réalité différem-
ment de ce qu’il croyait vivre lui-même.
Assis en face de Mike, il cherchait tous les moyens
de tester sa propre perception, comme s’il essayait de
prendre au piège celui qui la fabriquait. Mike rompit le
silence en lui demandant s’il avait apporté un nouveau
livre. Jack fit signe que oui et déposa le volume sur la
table près de lui. Il rangea doucement le sac dans lequel il
l’avait placé sans jamais quitter Mike des yeux. Celui-ci
commença à le regarder bizarrement puis lâcha :
— C’est la journée où personne ne parle ! Déjà, tout
à l’heure, on m’a observé comme une bête curieuse sans
rien me dire pendant une heure…
— Je ne vous observe pas comme une bête curieuse, je
cherche juste à comprendre.
— Vous vous êtes trompé de métier, Monsieur. Vous
auriez dû faire juge, vous êtes pareil qu’eux.
Jack ne répondit pas et resta sur la défensive. Mike se
détourna de lui et s’assit sur son lit-fauteuil dans sa posi-
tion habituelle. Ses gestes étaient lents et posés. La situa-
tion aurait eu un côté presque comique pour un obser-
vateur extérieur, ces deux hommes qui ne se parlaient
presque pas, l’un épiant l’autre.
assez forte pour lui signifier que rien ne pouvait survenir
d’une simple poignée de main, et qu’en fait, il ne s’agis-
sait là que d’un geste symbolique et rien de plus.
Lorsque leurs mains se touchèrent enfin, Jack fut bruta-
lement frappé au cœur. Les visions revinrent, encore plus
fortes et plus précises que les premières fois, avec cette
fois-ci en plus un sentiment total de détresse, d’abandon,
un appel à l’aide désespéré et rageur. Un jeune homme
blessé gisant au sol dans un uniforme militaire et appelant
au secours. Jack ne voyait aucun visage concret présent
devant lui, mais plutôt mille images ou mille visages qui
se succédaient à un rythme insoutenable.
Quand enfin, il leva les yeux vers Jack, tout fut d’un
coup plus calme, leurs mains se lâchèrent et Jack s’assit là
où il en avait pris l’habitude.
Il resta silencieux, comme son hôte, pendant cinq
longues minutes. Pour la première fois, il se trouvait
dans cette pièce sans la pression physique de l’angoisse.
Cette fois, il était perplexe, et réfléchissait à une vitesse
prodigieuse. Il faisait et défaisait des théories sur ce qu’il
était en train de vivre. Il se passait quelque chose, et il
était placé au centre de tout cela. De quoi, il n’en savait
rien pour l’instant, mais il ne pouvait plus se cacher l’évi-
dence : Mike produisait un effet sur lui. Plus exactement,
il lui transmettait quelque chose et il n’était plus question
d’en douter. Mais de quoi s’agissait-il ?
Un don paranormal ? Jack n’avait jamais manifesté
d’intérêt particulier pour ce sujet, si ce n’était à titre