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Jean-DiDier

et si c’était DéJà écrit ?

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Le chemin qu’il choisit passait par la zone des urgences, 

et il put se rendre compte que cette journée en apparence 
extrêmement calme était en réalité une journée chargée pour 
ces services. Clochards gelés, accidentés divers, les blessés 
ne manquaient pas. Il traversa toute cette zone sous tension 
éclairée par les gyrophares des véhicules de secours, et s’ar-
rêta un instant sur une des passerelles qui surplombaient la 
cour d’entrée. La noria des ambulances semblait sans fin, 
elles devaient carrément patienter avant de pouvoir déchar-
ger les malades dans de grands bruits de lits métalliques 
et de roulettes sur le sable mouillé. Le plus impressionnant 
dans la scène était cet employé de l’hôpital qui actionnait de 
temps à autre une sorte de lance-flammes, du genre de ceux 
que l’on utilise sur les chantiers pour calfater le goudron, de 
façon à maintenir la zone de débarquement presque sèche. 
Il y avait un côté presque infernal dans cette vision, et Jack 
resta  plusieurs  longues  minutes  accoudé  à  regarder  cette 
cour depuis son poste d’observation.

Il  se  présenta  à  l’entrée  du  pavillon  après  être  passé 

devant la chapelle. Celle-ci paraissait toujours aussi 
lugubre et abandonnée. Il n’y avait aucun signe d’acti-
vité,  et  pourtant,  une  liste  de  services  religieux  avait 
été affichée sur la porte. Ils étaient rares, et il n’y avait 
visiblement rien de particulier prévu pour les fêtes. Jack 
contourna la chapelle et passa le sas d’entrée en agitant 
son badge sous le lecteur à moitié couvert de glace.

Les gardiens le saluèrent. Il leur indiqua le motif de sa 

venue alors qu’ils ne lui avaient rien demandé et retrouva 

Ils restèrent silencieux jusqu’à l’hôpital. Jack descen-

dit en remerciant le policier, qui lui conseilla dans un 
rire gras de prendre une ambulance pour le retour. Jack 
lui dit qu’il essaierait et qu’il verrait avec les pompiers 
si ça ne marchait pas, puis monta les marches glissantes 
du bâtiment principal. Il se tenait fermement à la rampe 
et constata qu’elle était recouverte de glace. Il faisait 
encore un peu plus froid que ce qu’il avait envisagé, et 
comprit pourquoi il n’avait vu presque personne dans 
les rues, sur le trajet. Il pensa au taudis du quartier d’à 
côté puis, par association d’idées, à la vie de Mike avant 
sa dernière arrestation, les squats, la misère, le vol pour 
payer la drogue… À nouveau, tout cela lui semblait loin-
tain et peu clair, c’étaient des mots sans réalité concrète 
pour  lui,  exactement  comme  l’avait  été  leur  première 
rencontre.

Le grand hall était à peine plus fréquenté que lors de 

sa première visite. Mais cette fois, il vit tout de suite un 
groupe de sans-abris installés dans un coin. Le personnel 
de l’hôpital avait dû trouver plus logique de les autoriser 
à s’asseoir là au chaud plutôt que de les laisser mourir de 
froid dehors ou de les retrouver aux urgences quelques 
heures plus tard, en hypothermie. Le sol était plein de ces 
traces crasseuses laissées par la neige fondue qui tombe 
des chaussures. Le personnel semblait affairé et il eut du 
mal à capter l’attention de quelqu’un pour obtenir un plan 
de l’hôpital et quelques informations sur le parcours le 
plus simple pour parvenir au pavillon psychiatrique.

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