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Jean-DiDier

et si c’était DéJà écrit ?

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— Et moi je ne suis pas censé faire le taxi pour des 

pékins dans votre genre ! Allez, dites-moi donc qui c’est.

— Je ne connais que son prénom et une initiale. 

Mike S.

— Stanton ! Mike Stanton !
L’officier Morris avait relâché l’accélérateur et fixé Jack 

pendant plusieurs secondes après s’être exclamé.

— Vous… vous le connaissez ?
— Si je le connais ?! On a passé presque une semaine 

à le chercher dans toute la ville. Il avait buté un type et il 
se baladait avec une came pourrie, on allait se retrouver 
avec des dizaines de junkies morts sur les bras. Notre 
réputation était en jeu ! Ah, on peut dire qu’il nous aura 
fait courir, celui-là… Et maintenant, ce salaud reçoit des 
visites des huiles de la ville ! Excusez-moi, mais j’avoue 
que j’ai du mal à comprendre. Ce type est un déchet, et 
vous sortez aujourd’hui pour aller le visiter ! Et moi, je 
suis en train de vous y conduire ?!

Le policier passa brusquement d’une sorte d’énerve-

ment au rire. Jack n’avait pas réagi à ses derniers mots. Il 
répondit simplement, comme pour lui-même :

— Je n’ai pas choisi qui visiter. Et par ailleurs, j’ai dit 

que je viendrais aujourd’hui.

— Écoutez, excusez ma réaction. En fait, je ne suis pas 

encore complètement blindé. Je croyais pouvoir entendre 
n’importe quoi vu mon métier, mais non, il y a encore des 
choses qui me font tiquer… Le prenez pas mal, c’est juste 
que ça m’étonne, comme si ce gars méritait ça !

— Vous voulez dire que vous traversez la ville un jour 

de tempête de neige pour aller voir un fou à l’hosto qui 
n’est même pas de votre famille ?!

— Oui. Je m’y suis engagé. Je vous ai dit, je suis 

volontaire.

— Vous voulez dire bénévole, ce n’est pas votre boulot, 

quoi… C’est bien ce que je dis, vous êtes un drôle de 
bonhomme !

— Si l’on ne se tient pas ses promesses alors qu’on 

peut le faire…

— Oh, vous savez, je passe ma journée avec des gens 

qui ne tiennent pas leur parole, alors…

— Je comprends…
— Non, vous ne comprenez pas. Personne ne peut 

comprendre  ce  que  c’est  que  d’être  flic.  Votre  type,  à 
l’hosto, il ne serait pas un peu condamné aussi ?

Il avait dit tout ça presque sans changer de ton, les 

yeux rivés sur la chaussée.

— Euh… si, en effet. C’est quelqu’un qui a été placé là 

par la justice. Vous connaissez des personnes là-bas ?

— Il n’y a quasiment personne, juste une douzaine 

de malades, et ce sont presque tous des clients à nous 
qu’un juge progressiste a décidé de mettre là pour faire 
baisser les chiffres de la prison. À mon avis, celui-là, il 
va avoir du mal à se faire réélire… Comment s’appelle 
votre zouave ?

— Je ne connais pas son nom, je crois d’ailleurs que je 

ne suis pas censé le communiquer.

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