Jean-DiDier
et si c’était DéJà écrit ?
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dîner, ils s’interpellèrent l’un l’autre à grands coups de
« Écoute ! J’entends quelque chose derrière la maison »
et rirent en se regardant épier l’endroit d’où étaient censés
provenir les bruits. Au moment de se coucher, ils furent
assez surpris d’entendre effectivement un bruit peu discret
derrière le bungalow. Une lampe torche à la main, Jack fit
le tour avec Lydie blottie contre lui. Ils n’avaient pas à
proprement parler peur, ils étaient plutôt interloqués de
voir leur plaisanterie se réaliser. Jack sentit la main de
Lydie se crisper lorsque le faisceau de la lampe rencontra
la source du bruit.
Un loup magnifique était tout simplement en train de
fureter dans les poubelles du bungalow. La rencontre
avait un côté comique, et ils rirent devant le loup qui
fixait la lampe avec un air à peine étonné. Il devait avoir
l’habitude de venir faire ses courses à cet endroit et ne
craignait selon toute vraisemblance pas la lumière. Jack
dit qu’on ne leur avait pas menti, qu’ils se trouvaient bien
en pleine nature, mais qu’elle n’était en revanche plus si
sauvage. Le loup continua à déchirer les sacs et à renver-
ser les poubelles métalliques sous leur nez, visiblement
très à son affaire. Ils rentrèrent dans leur gîte, hilares. Ils
avaient enfin vu un loup en liberté, mais il se comportait
plus comme un clochard ou un chien errant que comme
un fauve.
Les quatre jours passèrent vite et ils se retrouvèrent
un matin à charger le break Volvo en faisant des allers et
retours depuis le bungalow. Ils avaient emporté beaucoup
les avaient engagés pour des dizaines d’années envers leur
banque. Mais le statut de fonctionnaire municipal de Jack
avait rassuré leur conseiller. Les revenus de Lydie, qui
peignait des fresques dans des boutiques, étaient quant à
eux bien trop fluctuants pour un tel crédit. Elle n’avait pas
décoré de lieu depuis la rentrée, pour mieux se consacrer
au suivi des travaux durant tout l’automne.
Ils partirent pour le lac le lendemain. Le week-end
de Jack et Lydie fut comme un long moment suspendu,
loin de la ville, loin de leurs vies respectives, exactement
tel qu’ils l’avaient voulu. Le bungalow dans le village
de pêcheurs isolé qu’ils avaient choisi leur avait immé-
diatement plu. Ils y passèrent quatre jours calmes à se
prélasser, à lire l’un auprès de l’autre, à se balader dans
les bois qui entouraient le lac, à faire de petits plats et à
faire l’amour. Pas une fois, Jack ne connut à nouveau les
affres du jour de la rencontre avec Mike.
Ils savaient que ce genre de bonheur ne pouvait exister
que dans des moments et des lieux particuliers, que leurs
vies ne pouvaient se résumer à cela, car Jack avait non
seulement besoin de travailler, mais il avait aussi besoin
de la ville pour s’épanouir, trouver de nouveaux livres,
mener des recherches, et nul doute que Lydie ne pourrait
de toute façon pas supporter longtemps de vivre loin de
son atelier. Pour autant, justement parce qu’il s’agissait
d’une parenthèse choisie, ce séjour leur sembla idyllique.
Une nuit, ils jouèrent à se faire peur en faisant semblant
d’entendre des bruits autour de la maison. Durant tout le