Jean-DiDier
et si c’était DéJà écrit ?
47
46
d’allocations pour l’un de ces types. Pas de doute, Jack
sentait bien qu’il ne venait pas du même monde que
Mike. Alors, que s’était-il donc passé un quart d’heure
auparavant dans cette chambre sombre ?
Jack tenta de reconsidérer toute la confrontation
en partant de la réalité de sa peur. Il avait eu peur, de
cela, il pouvait être certain. Déjà, la veille, il avait été
impressionné en relisant le dossier. Il y avait de quoi, au
fond. Mike était soigné en psychiatrie pour avoir tué son
dealer. Il l’avait étranglé puis lui avait volé son argent et
sa marchandise. Le type en question avait par ailleurs
essayé de le tuer la semaine précédant le meurtre en lui
refilant des doses de produit frelaté. Le document concer-
nant cette affaire, elle-même prise dans un trafic plus
vaste, ne contenait pas de description ni de noms, car le
jugement n’avait toujours pas été rendu. Mike était donc
encore un témoin aux yeux de la justice.
Un meurtrier. Mike avait ôté la vie à un de ses
semblables. Et dans cette affaire, il ne plaidait pas
coupable, son avocat invoquant la folie, les effets secon-
daires des produits consommés. Folie, donc service
psychiatrique, Morgan, etc. Jack considéra à nouveau sa
peur, maintenant diffuse. Il avait eu peur, certes, mais
était-ce de Mike ? Il se repassa mentalement ce qu’il
pouvait se rappeler de la rencontre et tenta de retrouver
ce qui, dans la présence ou l’attitude de Mike, avait pu
l’effrayer. « J’avais en face de moi un meurtrier, et je n’en
se retrouva sur le trottoir d’une rue au trafic assez dense.
Il n’y avait en revanche aucun passant en vue.
Jack décida de marcher jusque chez lui. Cela représen-
tait une bonne heure à pied, mais il avait besoin de cet
exercice, de s’aérer un bon coup. La simple évocation de
l’autobus rempli de gens engoncés comme lui dans leurs
habits d’hiver, butant les uns sur les autres, le dégoûta. Le
jour de Noël, les bus étaient plus que rares et pris d’as-
saut. Il ne se sentait pas d’attaque pour affronter cela. Il se
mit en route, en fourrant ses mains dans les poches de
son manteau, un peu gêné par la poignée de la mallette.
Il sortit ses gants et les enfila.
Les alentours de l’hôpital étaient sales et à l’abandon :
des immeubles visiblement squattés, des terrains vagues
et des rues larges aux abords presque impraticables
pour un promeneur dans son genre. Toute une faune de
clochards, de drogués et d’autres individus en rupture
de ban plus ou moins volontaire vivaient dans cette zone
autour de l’énorme hôpital. Tous en dépendaient d’une
manière ou d’une autre, pour se soigner, manger ou
simplement mendier. Jack croisa de temps à autre une
ombre furtive, une silhouette qui ne le regardait pas en
face, cachée sous plusieurs épaisseurs d’habits d’hiver
bon marché. Il s’arrêta pour entrer dans un coffee shop,
commanda un cappuccino, puis sortit pour le termi-
ner dans la rue. Il s’était senti rejeté par le lieu, par les
quelques personnes qui s’y trouvaient. Son manteau de
laine gris chiné devait à lui seul représenter un mois