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Jean-DiDier

et si c’était DéJà écrit ?

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L’homme qui était assis avec elles n’intervint pas, il 

était davantage préoccupé par Jack, qui était tellement 
penché vers eux qu’il risquait un tour de rein ou une chute.

— Euh… oui, enfin, je ne sais pas, mais en tout cas, 

la prison n’est pas une solution, c’est… euh… c’est l’école 
du crime !

Jack s’entendit soudain dire :
— Mais qu’est-ce que vous en connaissez, vous, de la 

prison ?!

Ils restèrent interdits, considérèrent Jack d’un air 

gêné et reprirent le cours de leur débat qui lui semblait 
somme toute bien naïf. Son plat arriva au même moment. 
Consterné par son comportement, Jack produisit des 
efforts considérables pour se concentrer sur son repas. 
Il mangea trop vite, bruyamment et salement. Il avait 
réussi à ne plus faire attention à son environnement, de 
crainte de commettre à nouveau un impair, mais malgré 
cela, son comportement le rendait visible. Sa table était 
souillée, ses gestes brusques lui faisaient renverser un 
peu tout ce qu’il touchait. Très énervé, il paya debout et 
sortit à la hâte.

Il lui restait une demi-heure avant de rejoindre son 

bureau. Il se mit à faire le tour de l’hôtel de ville dans 
le jardin qui l’entourait. Les allées avaient été salées et 
s’avérèrent praticables. Jack respira profondément et 
essaya de reprendre le dessus sur les pulsions brutales qui 
l’assaillaient. Il se sentait étouffé, brimé. Il défit le nœud 
de sa cravate et remonta son pull-over pour que cela ne 

— Je n’ai pas dit que la prison était inhumaine, j’ai dit 

que les couloirs de la mort étaient une sorte de torture 
au ralenti, et que ces gens devraient être exécutés tout 
de suite.

— Et donc, pas de prison à vie ?
— Euh… non.
— D’ailleurs, on se demande bien pourquoi on met 

tous ces gens en prison, hein, on ferait mieux de les tuer 
tout de suite ou de les déporter, non ?

La  femme  sexy  avait  dit  ça  sur  un  air  méprisant  et 

surjoué qui fit honte à son interlocutrice.

— Vous déformez mes propos, je trouve juste qu’on 

traite ces gens de façon illogique en les emprisonnant 
pendant des années dans des endroits qui nous coûtent 
cher  et  où  ils  apprennent  la  paresse  et  l’oisiveté,  pour 
ensuite les tuer comme ça, un beau matin.

— Et  que  pensez-vous  alors  de  ceux  qu’on  enferme 

pour trois fois rien, parce qu’ils n’ont pas eu un bon 
avocat ou de l’argent pour être libérés sous caution, ou 
tout simplement parce qu’ils sont noirs ou pauvres ? Vous 
ne parlez que des criminels que l’on condamne à mort, 
mais ils sont minoritaires : la plupart des gens qui sont 
en prison sont là parce qu’ils sont accusés de vol ou parce 
qu’ils se droguaient.

— Eh bien, il est normal de les mettre à l’écart alors, 

non ?

— Mais vous dites que ça les rend paresseux !

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