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Jean-DiDier

et si c’était DéJà écrit ?

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Jack se dirigea alors vers le salon, alluma le poste de 

télévision et regarda distraitement les nouvelles en atten-
dant la météo. Tout le journal local était en fait consacré 
à la tempête et il se dit qu’ils avaient bien failli finir leur 
week-end dans un gymnase perdu, comme les naufra-
gés de la route qu’on lui montrait. La voie qu’ils avaient 
empruntée était maintenant fermée et la police éprou-
vait  le  plus  grand  mal  à  décourager  les  derniers  fous 
qui voulaient se déplacer pour aller réveillonner loin de 
chez eux. La tempête avait causé des morts dans la jour-
née, une camionnette s’était encastrée sur des rondins 
qui dépassaient d’un camion de bois arrêté dans le bliz-
zard. Jack eut un pincement au cœur. Debout devant les 
fenêtres, une tasse de thé fumant à la main, il regarda 
longuement les flocons de neige épais qui tombaient. La 
visibilité était réduite, l’aéroport était lui aussi fermé, la 
ville allait être coupée du monde pour quelques heures, 
comme chaque hiver.

Le lendemain matin, Jack se réveilla tôt et laissa Lydie 

toujours fiévreuse au lit. Elle avait eu un sommeil agité 
et bruyant, elle avait même articulé quelques phrases 
décousues parmi lesquelles Jack avait cru entendre le mot 
« loup », mais il n’en était pas sûr. Il appela un médecin 
qui se présenta en fin de matinée. Lydie avait simplement 
pris un gros coup de froid, il n’y avait rien de particu-
lièrement grave dans son état, Jack pouvait sans crainte 
la laisser seule pour la journée. Elle était la quatrième 
personne qu’il visitait dans cet état depuis huit heures du 

qui était venue les trouver et qui avait une tête d’institutrice 
avec ses trois enfants, et deux fermiers. Jack se dit que ces 
gens ne se seraient jamais adressé la parole ailleurs que dans 
cette  cafétéria  et  qu’ils  auraient  encore  moins  songé  à  se 
faire confiance les uns les autres. Une caravane, pensa-t-il, 
comme au bon vieux temps.

Ils  arrivèrent  chez  eux  fourbus,  la  conduite  à  petite 

vitesse derrière les chasse-neiges s’était révélée nerveu-
sement  difficile.  Le  chauffage  programmé  du  loft  avait 
bien fonctionné, la température dans les grandes pièces 
était tiède, mais supportable, et celle de la chambre et de 
la salle de bains bien chaude. Lydie prit un bain après la 
douche de Jack, qui avait assuré le dernier relais. Celui-ci 
s’effondra dans le lit et dormit d’un sommeil sans rêves.

La journée suivante devait être une journée de courses 

pour trouver de petits cadeaux à offrir pour les étrennes. 
Ils  la  passèrent  finalement  au  lit.  Lydie  avait  pris  froid 
pendant le voyage et grelottait contre Jack, qui lut un 
roman policier presque d’une traite. Mike, Morgan, l’hô-
pital, tout cela lui était complètement sorti de la tête, au 
point qu’il dut consulter son agenda pour se rappeler le 
rendez-vous du lendemain.

Vers huit heures, après avoir constaté que Lydie était 

franchement malade, il appela les amis qui les avaient 
invités pour le réveillon du Nouvel An et décommanda. Il 
apprit que la tempête se déplaçait vers leur région et que 
de toute façon, une partie des convives ne viendrait pas, 
de peur de ne pas pouvoir rentrer chez eux.

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