Jean-DiDier
et si c’était DéJà écrit ?
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Sa tête vrombissait des mille pensées et sentiments qui
s’y agitaient. Ce ne fut que quand elle éclata en sanglots
en s’asseyant par terre qu’il revint à lui. Il la prit contre
lui, la caressa longuement en lui massant le cou et le
poignet. Au bout d’une heure, Lydie se rendormit. Pour la
première fois depuis longtemps, Jack ne ferma pas l’œil
de la nuit. « J’ai peur de dormir. » Il se répéta cette phrase
jusqu’au réveil de Lydie, qui semblait avoir tout oublié.
Jack venait de passer une nuit blanche à reconsidérer
toute la journée de la veille. Chaque élément, chaque mot
prononcé, l’ordre de tous les événements, et ce jusqu’au
moindre détail, bref, tout ce que sa mémoire avait enregis-
tré, il l’avait replacé et réinscrit dans une sorte de grand
récit. Mais rien ne vint. Rien ne permit de fournir une
explication rationnelle à ses deux derniers cauchemars,
ou plutôt à leurs forces et à leurs acuités. Quant au fait
que le deuxième l’avait poussé à agir de façon violente,
cela le laissa franchement inquiet.
Ils mangèrent en reprenant là où ils l’avaient laissée
leur conversation sur le week-end, et finirent par s’accor-
der sur le fait qu’ils voulaient faire un peu trop d’activi-
tés en si peu de temps. Ils dressèrent donc deux listes et
rayèrent chacun dans celle de l’autre ce qu’ils ne souhai-
taient pas faire. Ils rirent beaucoup, débarrassèrent la
table et se mirent au lit après avoir lu une petite heure
l’un contre l’autre, dans l’immense pièce qui leur servait
de salon.
Jack avait pu faire semblant d’aller parfaitement bien
jusque-là, mais lorsque Lydie se serra contre lui en l’em-
brassant, il ne put retenir un raclement de gorge sans équi-
voque. Il était incapable de faire l’amour, de se concentrer
sur le plaisir de sa femme avec ces dizaines d’images qui
continuaient de danser dans son esprit. Lydie poussa un
soupir déçu, mais ne montra aucun signe agressif. Elle
resta lovée contre lui. Il glissa son bras sous le sien et
prit son poignet au creux de sa main. Ils se souhaitèrent
bonne nuit.
Tenir. Ne pas lâcher sa main. Si elle partait, elle parlerait.
Ne pas la laisser partir, surtout ne pas la laisser partir… Le
cri de Lydie ne suffit pas à réveiller Jack. Ce fut un grand
coup de coude dans la poitrine qui le sortit de là.
— Tu m’as broyé la main, j’ai mal. Nom de Dieu, mais
qu’est-ce qui t’arrive, bon sang ?!
— Je suis désolé, je suis désolé…
Jack parvenait à peine à s’intéresser réellement à
Lydie, qui avait sauté hors du lit. Il restait là, hébété.